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lundi 8 septembre 2025

Supplément enfants (4) fabliau

 
        Le temps est doux
        l'ours danse
        lourdement
        le dresseur montre l'ours
        et l'ours montre les dents

        un nuage qui voyage
        en passant les salue
        l'ours aimable grogne un peu
        c'est pour l'argent
        l'argent des gens contents


Le montreur d'ours (L'orsalher en occitan) film de Jean Fléchet - 1984

vendredi 18 juillet 2025

Supplément enfants (3)


Marcher
c'est comme
voyager en escargot

on a le temps 
de regarder
de sentir d'écouter

on a le temps
et tout l'espace
dans ses poches
quand on marche



mercredi 23 avril 2025

Méditation


        Je lui ai dit vouloir connaître l’art du zen
        il a relevé la tête
        son sourire était sincère

        laisse ton reflet à l’araignée
        ton ombre au pas feutré du chat
        laisse-les finir ainsi
        abandonnés comme des vieux rêves

        et tire un peu
        sur l’élastique de ton jeune cœur

        puis le vent a chahuté
        son feuillage et sa vieille barbe 
        avant que les colombes rassurées n’y reviennent
        méditer


Alexandre Hollan

vendredi 21 février 2025

Sirocco


À l'aube sur les voitures
étrange voile de sable rouge
– mondialisation


J.M. Folon

jeudi 30 mai 2024

Supplément enfants (2)

 

    À l'angle de la rue
    où il y avait autrefois
    un fourreur qui vendait
    des manteaux d'animaux
    
    à l'angle de la rue
    face à la banque dorée        
    où aujourd'hui se croisent
    les parapluies des gens

    à l'angle de la rue
    en ce premier matin de mai
    s'est installée
    la petite marchande de bonheur


Stefana Serafinescu


mardi 12 mars 2024

Supplément enfants


J'ai attrapé le chat
au bout d'une ficelle

et je le mangerai
à l'heure du repas

à moins que d'ici là
il m'aime
qu'il n'aime que moi


L.D 2024
(d'après une carte postale de la basilique San Clemente à Rome)

vendredi 16 février 2024

Deux génies


Une maison sur pilotis face à l’océan, sur une plage sans début ni fin, une voiture qui ne connaît pas la panne, un crédit illimité chez l’épicier du coin, et des amis fidèles par milliers. Me croyant malin, j'ai cru bon d'ajouter: "Tout ça, Génie, ce n’est que mon premier vœu". Et cet imbécile a fait de moi un poète américain.


Hugues Erre

mardi 12 décembre 2023

L'adieu aux ourses


        Dans notre adieu aux ourses
        auront-elles
        nos larmes
        encore assez de force
        pour ressembler à des larmes

        en cette minute
        où rien n'est un mensonge
        elles seront belles les ourses

        plus belles que jamais
        et nous tranquilles
 

Madeleine Roger-Lacan

jeudi 30 novembre 2023

Mother


Salon de thé, en terrasse, table ronde ourlée de cuivre et la rumeur de ces gens biens qui espèrent tous conquérir le monde. Juin soleil, dans le désert génial de ta mémoire, l'été me livre ta présence.

Héritier bienheureux de ta belle pauvreté, ôtant discrètement mes chaussures sous la table je touche ainsi à l'infinie douceur de l'air. Toi, comblée par l'éclat de ta serviette en papier, tu dis que le jaune est ta couleur préférée – elle disparaît dans ta poche.

Et tu m'envoies un baiser de la main, comme ça pour rien, par dessus nos tasses. Trois moments où l'on est vraiment seul dans la vie: devant la vitre du photomaton / le jour où on doit faire sa valise / quand sa mère meurt. Derrière toi, un ange lustre ses ailes.

Combien de temps avant que ton joli prénom ne devienne une place vide? Je tente de traduire en anglais mon sentiment: Simply ma mother in the summer light... La phrase approximative dérive dans le grand bleu du ciel.

Nous partageons le dernier macaron aux amandes.


Cy Twombly

lundi 18 septembre 2023

Centon sous la pluie

 

        Un musicien ambulant:
        – Que faites-vous là petite fille?
        Et la pluie se mit à tomber.

                (D'après Jacques Prévert)


Rodolphe Caillaux


    * Après Centon de Provence et Centon de solitude.

mercredi 28 juin 2023

Sans titre (les carottes)

 

        Qu'aurai-je vu aujourd'hui
        qui ne soit pas violence
        angle vif ou désir puéril

        Les moineaux près du banc
        qui d'un œil égyptien
        lorgnaient sur mon kébab

        Le ciel
        bien au dessus des rues
        inutile et pourtant toujours là

        La façade en lambeau
        d'un ancien cinéma

         Les carottes fraîches - Polder (revue décharge) 2013


Jacques Villeglé

jeudi 8 juin 2023

Bottin des oiseaux

 
        Sizerin
        Pétrel & Francolin
        Tarin Guifette Fuligule
        Iranie Tangara Durbec
        Harfang
        Puffin Pipit & Coulicou 
        Mergule & Macareux
        Tadorne & Monticole
        Goglu
        Rollier
        Labbe pomarin       
        
        Pouillot
        Rémiz
        Marouette & Lusciniole
        Harle piette & Avocette
        Jaseur
        Moqueur
        Tournepierre & Guillemot
        Niverolle
        Nette rousse
        Courvite Robin Sirli
        Hypolaïs
        

    Paul Klee

vendredi 5 mai 2023

Le surréaliste

 

        J'ai pratiqué l'autopsie de mes rêves
        ils étaient fatigués d'attendre
        rongés par les regrets
        avortés
    
        j'y ai trouvé le beau
        le grand le sublime élan de la vie
        qui dit lumière quand tout est sombre
        et je m'y suis noyé


    photo Willy Ronis

vendredi 21 avril 2023

Tranquille

 
      Parfois j'envie la vache ruminant dans son pré
      de n'avoir jamais entendu parler d'Hiroshima




    photo Yasuhiro Ishimoto
    * On ne peut plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux. (Pierre Reverdy)

vendredi 27 janvier 2023

Océan

 

    J'ai rencontré Pascal, un breton.
    Nous avons longuement parlé. De tout, de rien. De la Bretagne évidemment.
    Il m'a dit: 
    Là-bas quand on s'ennuie, on va voir la mer. Il s'y passe toujours quelque chose.
    Entre terre et ciel. Entre regard et météo.
    Dans sa jeunesse, Pascal a officié comme mécano sur un pêcheur.
    Une part et demi.
    Le boss avait deux parts. Le marin une part. Le mousse une demi-part.
    L'homme à terre,
                une demi-part.
    C'est ainsi qu'avant on partageait le bénéfice de la marée.
    Un boulot dur.
    L'hiver en mer du nord, 60 degrés d'écart entre la salle des machines et le pont.
    Parfois des creux de huit mètres.
    Tout le monde dégueulait, même les plus endurcis.
    Et puis la peur de la panne. En tempête il faut de la propulsion, sinon...
    
    Bleu. Le ciel bleu repousse. Toujours.
    Pascal portait des chemises impeccables. Et une petite croix de bois.
    Moi j'étais jardinier.
    Nous avons trinqué à la pérennité du monde.



mercredi 11 janvier 2023

Evangile


    Reposant sur le flanc les pattes encordées
    la bête saigne encore
    par ses yeux grands ouverts
    de l'eau de source et des fougères
    l'automne est sec

    mais voilà que la mort nous fait signe de nous taire
    car la bête a bougé
    car la bête se délivre et d'un coup de reins solide
    se redresse et fait front

    demain c'était hier on la verra partout
    gracieuse parabole sautant d'un bond la route
    étoilant nos vieux pare-brises

    ici pourtant chez les chasseurs on se rassure
    la chambre froide est collective
    et de marque allemande


photo Eric Poitevin

Poème ayant déjà fait l'objet d'un billet il y a quelques années.

lundi 24 janvier 2022

Papier millimétré


Je vais bien, ou quelque chose comme ça. À dire vrai j’ai une doublure qui travaille à ma place, fait la queue dans les supermarchés, tombe en panne de voiture, tandis que moi j’arrive pour les couchers de soleil, les nuits d’amour et la senteur des roses.

À l’occasion d’une côte cassée, un toubib un peu idiot m’a fait passer un électro-cardiogramme. D’où ces trois vers, notés le soir même sur le papier millimétré :

    Par minute soixante et une
    pulsations sur le charleston
    un cœur qui bat – grandiose

Je lis toujours beaucoup, ce qui laisse peu de temps pour écrire. Je pense à toi qui à présent tutoie le vent de la Camargue et son soleil de marbre blanc. Un jour sans doute irons-nous ensemble à cheval saluer salicornes et roseaux, l’aigrette et le petit pêcheur.

En attendant, le monde à portée de main, de regard, le monde approvisionné en chats, en fleurs en arbres en rouge-gorges, en cris d’école en clarinettes, en soleil sur les toits, le monde ralenti des piétons qui flânent, plumes délicieusement ouvertes au vent chaud des avenues, ce monde-là te salue bien.